02 mars 2024

ArchiEtecture pour chiEvilisation qui coule...


Il y a des signes qui ne trompent pas : les vomissures archiEtecturales produites depuis la Seconde Guerre mondiale renseignent sur le niveau de notre civilisation et sur l’état d’esprit des peuples du moment.

Alors qu’un immeuble haussmannien incite à lever les yeux pour s’emplir de l’esthétisme des courbes et des pierres lumineuses, les chiures de ce qui est produit aujourd’hui laissent le regard plonger vaguement vers le bas. D’un côté l’aspiration au beau, la transcendance visuelle, l’élévation de l’être ; de l’autre le médiocre repliement vers son nombril, la tête baissée vers quelque écran au minable contenu. L’avachissement de nos lieux de tristes vies sont bien à l’aune de ce qui encombre les cortex : laideur inutile, débilitantes distractions.


Le temps coulant défigure nos villes et villages : ne parlons plus de bâtisses, mais de monceaux informes, ni de fenêtres mais de trous à l’insipide géométrie, plus de façades, juste de plates immondices qui occultent le ciel.

Désormais il faut détruire une belle demeure du XIXème siècle et diviser son parc pour y déféquer des parallélépipèdes sans âme et dont les occupants mépriseront chaque centimètre carré, pour les plus affûtés d'entre eux, les autres se satisfaisant d’une indifférence au contenant de leur vivotage domestique, se fantasmant un contenu par pixels interposés.


Du rien, du vide, du néant qui fait baisser le regard bovin en attendant la fosse et l’oubli. La trajectoire, tant collective qu’individuelle, se trouve incarnée par cette archiEtecture pour humanité ras de crasse.






19 janvier 2024

Ma Blandine - Derniers jours près d'elle


21 décembre, 0h19

Hier soir, l'état de Blandine est tellement dégradé, notamment sur le plan respiratoire, qu'elle me demande d'appeler le SAMU. À nouveau une hospitalisation... l'horreur tenaillante. Son corps semble lâcher de toutes parts, les combats à mener étant trop nombreux. 
Peu de temps après le départ des ambulanciers j'ai une amie au téléphone et je craque : larmes de celui qui assiste à la dégradation inexorable de celle qui a partagé plus de deux décennies de vie. Envisager le pire rode désormais sur cette fin d'année. S'il devait arriver, ce serait un cataclysme intime.

9h01 - Je viens d'avoir un texto de Blandine : a peu dormi et demeure très essoufflée ce matin. Elle est en unité de soins continus. J'attends qu'elle me dise quand je pourrai passer la voir.


22 décembre, 10h33

Message de Blandine : elle devrait être transférée à la Protestante aujourd'hui. Pas plus de nouvelles pour l'instant.
18h48 - Je viens d'avoir ma maman au téléphone et lui ai résumé la situation.

19h22 - Je suis avec elle et je lui tiens la main, bouleversé. Elle arrive tout juste à dire quelques mots.
19h26 - Je me surprends à prier pour qu'elle aille mieux.
19h44 - Je resterai dormir avec elle demain soir.
C'est éprouvant tous les soins donnés.
Je suis sorti dans le couloir le temps de (...).
22h51 - Difficile de la voir dans cet état. Nous avons pu échanger un peu. Elle accepte de voir sa sœur dimanche.
Moi j'irai dormir là-bas dès demain soir, car elle est dans une chambre avec deux lits qui nous sont réservés.
22h55 - Elle me donne l'impression de vouloir se battre pour surmonter cette épreuve, mais quand je la vois dans cet état...
Je vais la soutenir du mieux que je peux.
22h59 - J'ai redit à l'infirmière de garde qu'elle pouvait me joindre à n'importe quelle heure cette nuit en cas de problème.

23 décembre, 4h23

Hier soir, alors que je commence quelques courses, appel d'une médecin de la Protestante, collègue de l'oncologue qui suit Blandine, pour m'informer de son état respiratoire préoccupant et m'inciter à venir la voir sans tarder. L'origine de l'inflammation pulmonaire semble multifactorielle, mais ce qui est "inquiétant" - adjectif qu'elle emploie plusieurs fois au cours de l'échange - c'est que la respiration ne s'améliore pas malgré les traitements donnés (cortisone, antibiotique...).
(...)
Arrivé au troisième étage de la Protestante, je comprends que sa chambre est dans le secteur protégé des soins intensifs. Après avoir sonné pour accéder à l'unité, je me rends, le pas pressé, la gorge serrée, vers la chambre 356. Celle-ci à la porte ouverte et j'aperçois ma Blandine étendue, avec un dispositif conséquent pour sa respiration. Elle semble dormir et me voit alors que je pose mes affaires. Quelques mots sortent faiblement au milieu du système d'assistance respiratoire et elle semble heureuse que je sois là. Je m'assois près d'elle et lui tiens la main. Si faible, avec perfusions, sonde et tuyaux : la voir ainsi me chamboule. L'aide soignante et l'infirmière m'indiqueront que je peux rester dormir : un autre lit est en effet présent dans cette chambre et restera vide afin que je puisse en disposer. La situation peut se dégrader d'un coup. Dès ce soir je serai avec elle tout comme les nuits suivantes et j'ai laissé mon numéro à l'infirmière pour me joindre à n'importe quel moment.

Dimanche, sa sœur doit passer la voir.
Par la réaction de sa main, son regard et les quelques mots prononcés je la sens réconfortée de ma présence, mais son état m'angoisse, laissant craindre le pire. 
Je dois être près d'elle le plus possible et notamment pour toutes les nuits à venir.
8h - Je me sens profondément triste, mais résolu à apporter toute la douceur possible à ma Blandine dans ces instants.
12h10 - Je lui ai annoncé ma venue en fin d'après-midi et pour la nuit et elle en est très heureuse.
17h17 - Je suis arrivé.
Elle semble encore si faible. Atroce.
17h48 - Elle dort... je veille avec le bruit de l'oxygène.
17h51 - Elle émet des sons, comme une plainte ou des mots pendant ce sommeil. C'est inquiétant.
18h06 - Je surveille ses données vitales : son rythme cardiaque était monté à 110 et là il est redescendu à 91 après mon passage près d'elle pour l'apaiser.
Parfois ça se met à sonner parce que ses données sont trop basses ou trop hautes... A l'instant : 90, 93, 24...
19h08 - La soirée est si morose. Je corrige quelques copies en surveillant l'état de ma Blandine.
20h23 - Je suis dans le noir avec l'ambiance d'une chambre de soins intensifs... j'écoute un podcast sur l'assassinat du président Paul Doumer en 1932.
20h50 - Elle tousse beaucoup ce soir. Inquiétude.
21h13 - J'ai du mal avec l'ambiance hospitalière...
Elle doit avoir de la cortisone ce soir, ce qui risque de l'empêcher de dormir... alors qu'il faudrait lui donner le midi.
21h45 - C'est vraiment éprouvant à vivre. Je me suis assis près d'elle pour qu'elle se détende et peut-être s'endorme.
21h53 - La toux ne se calme pas. Je me remets au dodo mais impossible de fermer l'œil.
22h07 - L'infirmière vient de revenir : elle va voir avec le médecin si on peut lui faire un aérosol.
J'entends sa respiration prise depuis mon lit malgré le bruit de l'oxygène. Démentiel.
22h21 - Aérosol avec sérum physiologique installé pour une vingtaine de minutes en attendant de savoir si le médecin souhaite ajouter des produits.
22h36 - Ca semble lui faire du bien... encore cinq minutes et on rappelle l'infirmière.
23h15 - Toujours de la toux...

24 décembre, 1h19
Horrible : je viens de rester près d'elle après qu'elle m'a appelé... sa détresse respiratoire s'accompagne d'un rythme cardiaque à 106 en moyenne. Les poumons restent très encombrés malgré le produit injecté. Impression d'un effort énorme du corps pour chaque chaque respiration.
Horrible.
2h54 - L'enfer de la maladie. Rien ne semble fonctionner pour enrayer cette gêne respiratoire.
3h04 - Enfin ça semble se calmer...
8h29 - Je lui tiens la main... toujours difficile respiration.
8h49 - Son état m'inquiète. A une amélioration suit une dégradation et ainsi de suite.
18h06 - Elle respire mieux ce soir... je n'entends plus la gêne. On lui a posé un patch... j'
essaierai de voir avec l'infirmière car elle n'a pas vu le médecin.
18h23 - Menu de Noël à la Protestante : bisque de homard, cassolette parmentier de canard, faisselle fromage blanc, gâteau sapin au chocolat...
19h17 - Blandine dort depuis une heure... tout seul devant l'ordi dans cette chambre d'hôpital... Pas joyeux.
21h57 - Le sommeil de Blandine est bien plus apaisé qu'hier, la nuit devrait mieux se passer.

20h27 - Passage, cet après-midi, de la sœur de Blandine et de son compagnon pour être quelques instants avec elle.
Après la pose d'un patch de je ne sais quel produit limitant les encombrements dans la gorge, la respiration de Blandine s'est nettement améliorée et l'indice de saturation oscille entre 96 et 97 contre des valeurs beaucoup plus basses hier qui faisaient sonner la machine centralisant les données. 
Une deuxième nuit que j'espère moins éprouvante.

25 décembre, 19h04

Blandine va moyennement ce soir.
L'encombrement se poursuit malgré tout ce qui a été mise en place, dont le kiné... mais pas d'effet notable.
19h30 - Ambiance lourde ce soir... impression d'assister à une nouvelle dégradation. Infirmière appelée. Elle va faire une aspiration.
19h42 - Malheureusement peu d'effet. Le médecin doit passer. Là je suis près d'elle et lui tiens la main.
20h26 - Toute son énergie se concentre sur l'acte de respirer... celui auquel on ne pense pas tant il est naturel en situation normal.
Effroyable.
20h45 - Je dois à nouveau sortir pour des soins... me voilà debout en pyjama dans le couloir... un peu fébrile.
20h54 - J'ai réintégré la chambre : il était temps que je m'allonge.
21h17 - Enfin une intervention qui semble avoir dégagé sa respiration. Je n'entends plus d'encombrement mais juste le bruit des appareils... je la laisse dormir.
21h44 - Le médecin de garde vient de passer, mais aucune réponse à mes deux questions : en sait-on plus sur l'origine de l'inflammation ? Que peut-on dire sur l'évolution de son état depuis son admission en soins continus ?
Il faudra voir avec l'oncologue qui la suit.

26 décembre, 18h47
Je vais voir l'oncologue. J'appréhende...
19h19 - C'est le pire.
Evolution du cancer. Trajectoire palliative seule possible.
Coup de massue.
Je vais appeler ses parents.

20h37 - L'annonce tant redoutée m'est faite ce soir, en présence de Blandine, par l'oncologue Dr D. : la dégradation respiratoire n'est pas due à une inflammation pulmonaire mais à l'évolution incontrôlable de son cancer. Dans son état les perspectives thérapeutiques s'évanouissent et c'est la voie palliative qui est la plus probable. Elle ajoute que la dégradation peut intervenir très rapidement.
Je chancèle et dois m'asseoir un instant. Ma Blandine va ne plus être, ma gorge se serre : toute cette existence heureuse et paisible partagée avec elle...
Je décide d'appeler ses parents pour les informer de cela et les encourager à venir plus tôt que cela n'était programmé, car il s'agit peut-être d'une question de jours. Je contacte aussi ses deux amies lyonnaises qui doivent venir respectivement demain et jeudi pour la voir.
Lorsque je lui précise ce qui se profile, ma Blandine semble garder espoir... cela me dévaste plus encore. Je suis comme assommé par l'inéluctable qui va frapper bien trop tôt. 
Elle est là, toute faible, dans un demi-sommeil, avec la machinerie qui la fait respirer, avec son adorable petit nez envahi par ces tuyaux, je la regarde et intérieurement je m'effondre, mais à l'extérieur je dois demeurer un solide, doux et attentionné soutien jusqu'au bout. 
Ma Blandine fauchée si tôt, c'est insupportable à envisager.
Le dernier (et seul) décès marquant pour moi a été celui de ma grand-mère en décembre 2006... et voilà que ma compagne de vie...
J'arrête là les mots, pour l'instant : les petits sons qui sortent d'elle, malgré le vacarme de l'oxygène produit, sont comme de petites plaintes, mais elle ne souffre pas ainsi qu'elle le déclare à chaque fois au personnel soignant.
Je suis là, totalement désemparé et perdu, ne pouvant que me raccrocher à la volonté d'être présent jusqu'au bout dans la douceur totale.
Ma Blandine, si douce, si bienveillante, je te témoigne ici, comme lorsque je tiens ta petite main de velours, ces derniers jours, tout mon amour.
21h41, dans son sommeil des mots incompréhensibles sortent et je crois à chaque fois qu'elle me demande quelque chose. À l'instant elle vient de me dire, bouleversante, "je dors, ne t'inquiète pas"... je suis ému par son instinctive bonté qui se renouvelle même en ces effroyables moments.
Son rythme cardiaque ne descend pas au-dessous de 110, comme si le corps s'emballait pour résister encore...

22h16, (...) Ma détresse est totale. Je dois me reposer pour tenir, mais cette agonie, sans souffrance ressentie, du corps de Blandine me pétrifie. 
Tous ces mois, toutes ces années à combattre cette saloperie de cancer, ces espoirs, cette reconstruction mammaire inachevée, ces retours à une vie presque normale et puis d'un coup la pneumocystose et la reprise du fléau cancéreux. 
Chérir le peu de vie qui lui reste pour l'entourer d'amour, c'est ce que je peux et dois faire avant tout.
À l'instant elle me dit, encore dans son rêve probablement, "j'étais à la maison"... cette maison qu'elle a dû quitter en détresse respiratoire alors que nous devions retrouver notre vie partagée. L'intensité de l'irréalisé, aiguisée comme une lame, me transperce.
Je dois dormir, mais je suis hanté par tout qui se bouscule : cette douceur que ma Blandine apporte à la vie, cette énergie bienveillante, les moments ritualisés qui modèlent notre existence, ces myriades de gestes et d'attentions qui rendent si délicieux notre quotidien... 
Et là, cette nuit, ses mots que je prends pour des appels et qui sont la verbalisation de rêves se bousculant... Lors d'une de ses manifestations elle me demande "un vrai verre pour boire" alors qu'elle ne peut plus rien avaler depuis des jours... Atroce.
23h23
Les moments sont de plus en plus bouleversants. À l'instant elle se croit de retour à la maison... cette maison qu'elle ne reverra probablement plus. C'est à hurler.
23h30 - Elle n'arrête pas de prononcer des paroles et je crois qu'elle m'appelle à chaque fois.
23h33 - Sa famille arrive demain vers 16h.
23h35 - Elle réclame de "boire pour de vrai".
23h38 - Les infirmières sont là... Blandine a essayé... mais évidemment rien ne passe.
C'est à pleurer.

27 décembre, 6h29
J'ai pu échanger un peu avec ma Blandine de notre vie, de ce qui rend la vie si douce à ses côtés. Nous avons aussi évoqué ses volontés : elle ne veut pas d'acharnement thérapeutique, elle fait don de ses organes et souhaite être incinérée (...).
Son état semble stationnaire mais le cœur est tellement sollicité et l'hypophyse sans doute atteint que je redoute la suite. La voir ainsi me désespère mais je dois tenir bon pour elle et la famille proche qui arrive aujourd'hui. 
21h24.
La venue des parents, frère et sœur a illuminé ma Blandine quelques instants. À la fin nous étions tous les cinq autour d'elle. Journée si dense en émotions partagées. 
Ce soir elle a des moments d'angoisse, notamment par rapport à la date... sa fréquence cardiaque restant extrêmement élevée.
Effroyable de la voir ainsi perdre pied.
4h10. Ses paroles sont de plus en plus difficiles à comprendre. En dormant elle s'exclame parfois entre deux sons qui font comme des plaintes. J'assiste à cette transformation le cœur serré. Les produits pour la dispenser des douleurs ont cet effet de mettre en retrait la Blandine connue et d'en faire apparaître une si fragile... À pleurer. 
Ma Blandine aimée, où es-tu ? Tu es là et pourtant si loin...
6h35. Tu as voulu te redresser et te mettre assise au bord du lit (auquel de petites barrières ont dû être mises pour éviter que tu ne tombes) afin de goûter un quartier de clémentine. Je n'ai pu t'empêcher cette action de vie... mais tu te fatigues très vite et j'ai dû demander au personnel soignant de te remettre dans la position assignée désormais. Tu n'auras même pas pu apprécier le jus de ce petit morceau de fruit. Effroyable.
8h19 - Je suis comme K.O. de cette situation vécue seconde après seconde. Ma Blandine semble tellement vouloir garder le contrôle d'elle-même... et moi j'assiste à celui, impuissant.
8h30 - Elle me dit à un moment : "Je ne me sens pas de partir" comme si cela recouvrait et le fait de se sentir encore plus forte pour lutter et le fait de ne pas se sentir prête à quitter la vie.
Elle est bouleversante et admirable à chaque instant de cette ultime épreuve.
17h51 - Je me suis étendu dans la pénombre en attendant la famille et le plateau-repas.
Les doses administrées sont les mêmes qu'hier... ils ont raison de ne pas baisser afin qu'elle ne souffre pas.
Tout se bouscule en moi... je lui ai dit combien je la trouvais extraordinaire d'avoir pu manger aujourd'hui non seulement un petit peu de glace mais aussi de la compote et d'avoir ingurgité un peu d'eau.
18h19 - La famille vient d'arriver.
18h52 - C'est dur.
J'ai à nouveau craqué devant eux et eux devant moi, mais on s'est tous promis de ne rien laisser paraître devant notre Blandine.

28 décembre, 14h44
Etat de Blandine dégradé. Elle n'est plus consciente.
18h34 - Toute la journée avec sa famille près d'elle. Je vais rester là, veiller.

29 décembre, 1h41
Ma Blandine s'est éteinte vers 0h25, paisiblement, progressivement et entourée de tout mon amour, de tout notre amour.

3h13
A MA BLANDINE

Il est des êtres de bonté, une bonté à la chaleur d'un nid : ma Blandine était / est de ceux-là. Mercredi 5 décembre 2001 commençait notre belle histoire. Vingt-deux ans et quelques jours plus tard, je suis devant vous, transpercé par le chagrin d'en être désormais privé.

15 octobre 2023
Me reviennent en vrac ces lumineuses parcelles de notre existence partagée comme une évidence : sa voix avec le timbre encore plus doux qui m'était réservé ; son enthousiasme pour chaque nouvelle journée ; son adorable petit "coucou" qui ponctuait tous mes retours dans "not' maison", comme elle disait, lorsqu'elle y était présente - et ces dernières années elle y était évidemment beaucoup ; sa longue chevelure que je respirais pour m'endormir ; sa gentillesse qui faisait de notre quotidienneté une douceur renouvelée ; son petit nez dont j'aimais parcourir du doigt la courbe si craquante ; l'élégance magnifique de son âme ; le courage incroyable qu'elle a montré jour après jour face à cette "longue maladie" comme dit l'euphémisme ; la sensibilité sans pareille d'un être avant tout bienveillant, ma Blandine... je pourrais continuer ainsi toute la journée à égrener les bienfaits de sa présence. 
22 octobre 2023

Nous étions faits pour le partage sans réserve de tous ces petits plaisirs qui emplissent le cœur de la certitude d'être avec le Grand Amour de sa vie.
Ma Blandine, tu me manques déjà tant... "Je suis là" sont parmi les derniers mots que tu as entendus de moi dans cette ultime épreuve.
Tu es pour toujours "Ma Blandine", "Ta BB" comme tu signais tes mots et textos ; je suis ad vitam "ton chéri" ainsi que tu commençais ces mêmes petits écrits plein d'amour. 
Tu me manques déjà tant, ma Blandine, mon Amour.

Dernière photo - 27 octobre 2023 - Parc du Val Rosay






02 décembre 2023

Les enragés

Pas de chœur, en l'espèce, juste une clique déchaînée qui, après avoir hurlé son indignation face aux atrocités commises par les troupes du Hamas, salive devant les crimes de l'armée terroriste israélienne et bave devant les méfaits de barbares colons. Il est temps de dénoncer cette complaisance qui absout d'office les massacres israéliens au nom d'un génocide subi voilà quatre-vingts ans par les parents et grands-parents des coupables envahisseurs et occupants de la Palestine !

Marre de lire et entendre tous ces prétendus porteurs de l'esprit des Lumières, de B.-H. Lévy à A. Finkielkraut en passant par le sénateur M. Habib lequel devrait honorer son mandat plutôt que se déshonorer comme porte-gueule du belliqueux Netanyahou... Eux, et tellement d’autres, nauséeux intellectuels à œillères, défendent jusqu’à l’obscénité un État qui cherche à anéantir toute trace palestinienne en Palestine par le déplacement massif d’une population terrorisée et l’ensevelissement de ceux restés sous les bombardements. Peu importe le mortifère objectif, B.-H. L. affiche son « Pourquoi je défends Israël » et Finkielkraut s’alarme de quelques croix de David taggués sur des murs de France sans la moindre marque d’empathie pour les milliers de morts palestiniens. Tous ceux qui ont signé le 15 octobre dernier la tribune collective "Islamo-gauchisme : nous ne devons plus tolérer l'intolérable" jugent sans doute légitime le massacre de masse commis par Tsahal dans la bande de Gaza. Ne rien dire sur l’impunité criminelle de l’armée israélienne signe l’abjecte mauvaise foi de ces donneurs de leçon prêts à vous stigmatiser antisémite à la moindre amorce critique.

Certains voudraient carrément pénaliser l'antisionisme, tel le sénateur Le Rudulier, ce qui reviendrait, par exemple, à empêcher le rappel des méfaits israéliens de 1948 à nos jours : l’illégale – et illégitime – occupation des terres palestiniennes, se torchant allègrement avec les dizaines de résolutions onusiennes, sans compter celles bloquées par le puissant complice américain ; les spoliations systématiques de Palestiniens au profit de nuisibles colons qui profitent de ces jours sombres pour humilier et/ou éliminer des Palestiniens de Cisjordanie avec l’onction gouvernementale ; les bombardements terroristes sur Gaza et son effroyable loi au talion disproportionné, pour un Israélien tué le 7 octobre, plus de dix Palestiniens l’ont été à ce jour ; l’indéfendable surdité d'une bonne partie des Israéliens à la demande légitime d'un État palestinien : tout cela dessine un bien repoussant tableau de cette société dans laquelle les Érinyes cultivent leur rage.

Refusons désormais ce lien pavlovien entre le peuple israélien et les populations juives de la moitié du vingtième siècle qui donnerait au premier un droit de crime contre l'humanité palestinienne au nom de ce qu'ont subi les secondes.

Dès 1967 de Gaulle avait parfaitement caractérisé la dérive du peuple juif réuni sur ces terres : « une ambition ardente et conquérante » source « d’interminables frictions et conflits », imposant depuis le pire aux Palestiniens. Il fut alors accusé d'antisémitisme par les adeptes de cette monomanie intellectuelle : les Beuve-Méry (fondateur du journal Le Monde), Jean Daniel du Nouvel Observateur ou Servan-Schreiber de L'Express laissèrent couler leur fiel mal encré.

Aujourd'hui, la voix de Dominique de Villepin sauve la dignité française en dénonçant ce travers psychique qui veut débusquer l'antisémitisme présupposé dans toute critique d'Israël. "À force de vouloir limiter la capacité que l'on a à s'exprimer, à force de traquer toutes les formes de pensée, on devient un très petit pays". Phare dans cet infect brouillard, merci Monsieur de Villepin.



 

01 novembre 2023

Tsahale guerre amasse les morts

Le traitement à œillères pro-israéliennes de la guerre Hamas-Tsahal décrédibilise Big Media français. Entendre, par exemple, Christophe Barbier légitimer les bombardements parce qu’ils proviennent d’une armée étatique bien propre sur elle, les chairs broyées et brûlées ne pouvant l’atteindre, mais condamner les troupes du Hamas pour leur tuerie de proximité signe la tendance politico-journalistique du moment.

Soixante-quinze ans d’occupation répressive, d’humiliation, de conditions effroyables de survie imposées à la population de la bande de Gaza et l’on voudrait une réaction mesurée, calibrée et pleine d’humanisme envers les colons israéliens qui ont envahi des terres palestiniennes. Quand considèrera-t-on à sa tragique hauteur l’interminable agonie des Gazaouis entretenue par les autorités israéliennes ? Une vie entière à subir des occupants qui bafouent avec morgue le droit international puisque le bibendum américain les couvre… Cette loi du plus impitoyable, qu’ai-je à foutre qu’elle soit suivie par des Israéliens de confession juive pour la quasi-totalité ? Ils pourraient être Bantous, Auvergnats de souche ou Tartempions d’outre-Terre que ça ne changerait rien au fait : le génocide perlé en cours depuis l’équivalent d’une existence est le premier des crimes.


Au nom de quel diarrhéique principe les bombardements massifs sur Gaza-camp de concentration seraient tolérables ? Parce qu’il y a eu actes ignobles, dits « terroristes », de combattants du Hamas ? Tsahal peut donc, avec la bénédiction occidentale, mener son opération criminelle selon une hémorragique loi du Talion : plus de huit mille Palestiniens tués – chiffre très provisoire – pour mille quatre cents morts chez les colons...

Soyons lucide : ce que veulent Netanyahou et sa clique c’est la disparition de toute trace palestinienne en Palestine. Comment cela se nomme-t-il lorsqu’on planifie et met en œuvre les moyens nécessaires à une telle fin ? Ce qui aurait été commis par n’importe quel autre Etat, tiens, au hasard, la Russie de Poutine, dans un territoire ne relevant pas de sa souveraineté, aurait déclenché des condamnations sans appel, des sanctions tous azimuts, la mobilisation de la justice pénale internationale et surtout une aide militaire massive pour la nation victime… mais avec Israël, rien, mieux même : le soutien aux sanguinaires représailles disproportionnées.

L’attaque du Hamas apparaît déjà bien modeste par rapport à tout ce qui a été perpétré depuis. Et si l’on ajoute à cela les décennies d’une tyrannie israélienne qui étouffe méthodiquement Gaza et dévore jour après jour la Cisjordanie, la violence déchainée du Hamas prend des airs de baroud suicidaire.

Seule solution : un coup d’arrêt immédiat imposé de force à la vengeance hypertrophiée de l’Etat israélien et la décision internationale de rendre l’intégrité territoriale à la Cisjordanie tout en désenclavant la bande de Gaza. Malheureusement les extrêmes de tous bords ont le vent mauvais en poupe et rien de viable ne se profile : d’un massacre l’autre comme seul horizon. Et ce n’est pas le croulant Biden qui aura l’envergure historique de lancer un ultimatum au Premier ministre israélien : un cessez-le-feu suivi de vraies négociations pour qu’enfin vive un Etat palestinien. Ça, ce sera lorsque les colons israéliens auront un cortex insulaire accessible à l’empathie pour les Gazaouis sans avenir…





04 avril 2023

Immonde état...

Tout ce qui se déroule incite à se retirer du champ humain. Les dirigeants criminels qui jouent avec la vie des autres pour assouvir leurs archaïques ambitions et combler leur ego grotesque, avec la complicité d'une partie de la population pour qui la "servitude volontaire", décrite par le fulgurant La Boétie, est devenue une raison d'être ; la dérive climatique qui rend dérisoire toute initiative à l'échelle d'un ou de quelques pays ; les manifestants et grévistes français qui s'acharnent dans leur pseudo révolution d'autruches... et tant d'autres facteurs qui pourraient s'agréger ici avec un peu plus de suivi de ma part.


Pétrifiant panorama qui impose un changement radical de fonctionnement de l'espèce humaine : l'anthropocène requiert une organisation politique à la hauteur de l'ère ouverte par notre genre vivant qui exploite, saccage et détruit massivement. Victor Hugo appelait en son temps à la naissance des "États-Unis d'Europe", mais la situation rend cette ambition, qui nous semble pourtant encore, pour nous Européens, inaccessible, trop timide et inadaptée aux défis imposés. Seule une gouvernance mondiale réelle - un Etat-Monde - pourrait atténuer la suite du processus provoqué par la frénétique activité humaine... Montaigne affirmait que ne rien faire constitue la première et la plus fondamentale des occupations, car elle se concentre d'abord sur l'acte de vivre : suivre ce précepte humaniste nous aurait fait économiser et mieux respecter les trésors de la Terre.


Nous voilà dans le chaos du changement climatique et des décérébrés aux manettes s'acharnent dans leur dérisoire, mais hautement criminel, déferlement militaire. Tant de vies, d'énergie et de moyens dédiés à la stérile folie de quelques-uns : voilà ce que devrait juger une juridiction pénale internationale, voilà ce que jaugeront, avec dégoût, les générations des siècles suivants si la dévastation engendrée par notre époque leur laisse la simple perspective d'exister. Honteuse arriération comportementale qui se déroule sans qu'individuellement on puisse influer en quoi que ce soit.


Alors modérer son rapport au monde aliénant reste la seule voie sans issue supportable.

12 mars 2023

Vie de boue : horizon crevé

En février j'ai effectué 53 kilomètres à pied, 299 à vélo et... zéro en voiture selon le relevé mensuel fourni par Google Maps.

Du fond d'un lit à la température corporelle j'ai bien conscience du privilège d'être en vie dans "le silence des organes" pour reprendre l'une des citations préférées des aspirants étudiants en médecine lors de leur épreuve écrite de SSH. Le chaos dépeceur est lui fortement aux basses œuvres en ce début d'année : une Terre dont on sait qu'elle tremble par nature en certains territoires, ce qui n'empêche pas des salauds-criminels de l'immobilier d'utiliser du sable comme matériaux de construction, donnant ainsi la patte tombale à leurs sordides édifications. Plus de cinquante mille morts en quelques secousses entre Turquie et Syrie : suppliciés Syriennes & Syriens d'un Vingt-et-Unième siècle qui ne leur aura épargné aucune tragédie.

Par centaines de milliers de charognes, l'Europe fournit aussi son obole généreuse à la Camarde via la guerre dont on commente tous les aspects techniques, logistiques, stratégiques, géopolitiques... jusqu'à la nausée. Tous ces morts pour quoi ? Encore et toujours défendre son bout de terre qu'une fois souverainement (re)conquis on pollue, défigure, malmène dans toutes ses couches...

Une strate d'hexagonal, pour finir, bien pitoyable. Le comportement de parlementaires, notamment issus du malfamé repaire LFI, beugle comme un révélateur de médiocrité : ils ne parlent plus, ils font juste du bruit ; ils n'agissent pas davantage, ils gesticulent ; plus de pensées élaborées, juste des saillies mal ficelées. Minable représentation nationale parfaitement à l'image de cette société. La députée Rousseau précise que l'Assemblée n'est pas un salon de thé... quelle lucidité ! Mais l'Hémicycle a-t-il pour autant vocation à singer les coulures d'une quelconque buvette aux pochtrons incommodants ? Cette manière de se croire important parce qu'on braille plus fort que son haï voisin rappelle celle des tocards en taule ondulée ou sur deux roues motorisées qui parcourent à toute berzingue les artères urbaines pour pétarader au maximum. Du dérisoire pur jus cracra.

01 décembre 2022

Des cendres, en fait !


Assumer  de consumer ses restes en lambeaux, dans un isolement forcené, à l'aune de sa révulsion gangrénante. Dévastation en rage, amorphe tutoyant le nihilisme, perdition sans retour. Reste le silence, seule voie de l'ancrée souffrance : se laisser ronger par l'impossible, abandonner toute trace d'humanité et rejoindre le néant, doucement, en nuances cadavériques.

Etre dans l'angle mort de l'existence pour ne surtout pas être perçu, voilà le résultat de décennies scripturales : monomaniaques indignations, confessions infimes, retrait terminal. Objets, accueillez-vous un drame ? De la plume inutilement coulante aux feuilles zébrées d'absconses courbes, il faudrait assécher la prisonnière expression, s'enterrer au fond de l'impasse. Emotion sans issue, analyse débilitante, réaction léthargique.

Se minéraliser pour supporter le calvaire : au bout du sentier embrasé, le précipice. En cendre, pour s'éparpiller au gré des courants, sans plus d'attache, en route pour l'infinitésimal. Disparaître.