03 juillet 2014

Mise en garde à... vif !

La Vème a le cuir institutionnel tanné : avoir un père politique qui fut un temps condamné à mort par contumace, ça vous immunise contre toute éclaboussure judiciaire. La petite nuance se niche dans les circonstances : le 2 août 1940, le salvateur Général subissait la décision infâme du tribunal militaire permanent de la 13ème région, larvaire bras armé d’un maréchal empalé sur le braquemart d’Adolf. Digression initiale : recadrons.
L’ancien chef de l’Etat prend cette garde à vue comme la pique vexatoire d’une magistrate en chasse. La saison des battues au Président recalé s’amorce sur les chapeaux de roues humiliantes… Cet affrontement politico-judiciaire rend illico ringard le huis clos entre Serrault le notaire et Lino le flic. L’exaspération du notable de province ne tient pas une seconde à côté de la grogne cataclysmique de Sarkozy. L’ex président a dû ingérer l’accusation de la juge d’instruction syndicalement à vif. En même temps, la qualification de l’infraction présumée ne dépareille pas avec le surengagement frénétique du mis en examen : comment imaginer qu’il ne puisse être l’auteur que d’une corruption PASSIVE ! Ce serait une insulte à son activisme débridé…
La gêne tient surtout au procédé judiciaire ayant permis ces soupçons. Pour être vu gardé il a fallu d’abord l’écouter sur une période si longue qu’elle l’assimile aux pires des délinquants, ceux constituant un danger majeur pour l’ordre public ce qui permet la mobilisation de tels moyens. Encore plus grave pour les libertés individuelles : le recours à l’écoute dérivante, pour paraphraser l’excellente métaphore de Claude Weill. Mise en place pour l’enquête d’un éventuel financement libyen de la campagne 2007, aucune confidence n’en sortira, mais l’oreille judiciaire surprendra quelques échanges compromettants pour une autre affaire instruite en parallèle… L’écoute opportuniste se justifie-t-elle dans la sphère délictuelle ?
Le non-lieu dans l’affaire Bettencourt devrait inciter à la plus grande prudence. La crédibilité de la machinerie judiciaire se verrait affectée par un nouvel aveu de charges insuffisantes. Ne doutons pas que la garde rapprochée de Sarkozy déchiquèterait alors les restes d'une juge si faiblement instruite.
Le fauve politique trouve ici un champ de bataille à l’aune de son tempérament  hors norme : en l’espèce non pour assouvir son appétit du pouvoir, mais simplement pour sauver sa peau politique.
Ce coup de semonce judiciaire aura eu le mérite de faire oublier un instant la ferveur footballistique mondialisée… Les équipes en lice tiendraient ainsi l’état psychique de leur pays entre leurs pieds ? Paroxysme dérisoire de cette ère du jeu, de la détente à tout prix, de la convivialité surjouée. Les mêmes qui vont hurler à l’unisson pour que la France triomphe de l’Allemagne et venge le match torpillé par le gardien Schumacher et un arbitrage au fond de culotte douteux, les mêmes se seraient mis tout ce qu’ils pouvaient sur la tronche si l’affiche avait présenté : France-Algérie. Oui, je sais ! je frôle le sportivement incorrect : la façon dont certains occiputs rasés ont fêté la victoire des Fennecs relevait davantage de  la provocation à l’adresse des nationaux que de la sincère jubilation. Mais là… carton rouge ! Ne surtout rien dire, minimiser voire nier dans le pur respect du bréviaire gestionnaire de l’autruche.

M’en fous ! Mon confort, au contraire d’un Sarkozy, c’est de n’être ni écouté, ni lu…