La
Vème a le cuir institutionnel tanné : avoir un père politique
qui fut un temps condamné à mort par contumace, ça vous immunise contre toute
éclaboussure judiciaire. La petite nuance se niche dans les circonstances :
le 2 août 1940, le salvateur Général subissait la décision infâme du tribunal
militaire permanent de la 13ème région, larvaire bras armé d’un
maréchal empalé sur le braquemart d’Adolf. Digression initiale :
recadrons.
L’ancien
chef de l’Etat prend cette garde à vue comme la pique vexatoire d’une
magistrate en chasse. La saison des battues au Président recalé s’amorce sur
les chapeaux de roues humiliantes… Cet affrontement politico-judiciaire rend
illico ringard le huis clos entre Serrault le notaire et Lino le flic. L’exaspération
du notable de province ne tient pas une seconde à côté de la grogne
cataclysmique de Sarkozy. L’ex président a dû ingérer l’accusation de la juge d’instruction
syndicalement à vif. En même temps, la qualification de l’infraction présumée
ne dépareille pas avec le surengagement
frénétique du mis en examen : comment imaginer qu’il ne puisse être l’auteur
que d’une corruption PASSIVE ! Ce serait une insulte à son activisme
débridé…
La
gêne tient surtout au procédé judiciaire ayant permis ces soupçons. Pour être
vu gardé il a fallu d’abord l’écouter sur une période si longue qu’elle l’assimile
aux pires des délinquants, ceux constituant un danger majeur pour l’ordre public
ce qui permet la mobilisation de tels moyens. Encore plus grave pour les
libertés individuelles : le recours à l’écoute
dérivante, pour paraphraser l’excellente métaphore de Claude Weill. Mise en
place pour l’enquête d’un éventuel financement libyen de la campagne 2007,
aucune confidence n’en sortira, mais l’oreille judiciaire surprendra quelques
échanges compromettants pour une autre affaire instruite en parallèle… L’écoute
opportuniste se justifie-t-elle dans la sphère délictuelle ?
Le
non-lieu dans l’affaire Bettencourt devrait inciter à la plus grande prudence.
La crédibilité de la machinerie judiciaire se verrait affectée par un nouvel
aveu de charges insuffisantes. Ne doutons pas que la garde rapprochée de
Sarkozy déchiquèterait alors les restes d'une juge si faiblement instruite.
Le
fauve politique trouve ici un champ de bataille à l’aune de son
tempérament hors norme : en l’espèce
non pour assouvir son appétit du pouvoir, mais simplement pour sauver sa peau
politique.
Ce
coup de semonce judiciaire aura eu le mérite de faire oublier un instant la
ferveur footballistique mondialisée… Les équipes en lice tiendraient ainsi l’état
psychique de leur pays entre leurs pieds ? Paroxysme dérisoire de cette
ère du jeu, de la détente à tout prix, de la convivialité surjouée. Les mêmes
qui vont hurler à l’unisson pour que la France triomphe de l’Allemagne et venge
le match torpillé par le gardien Schumacher et un arbitrage au fond de culotte
douteux, les mêmes se seraient mis tout ce qu’ils pouvaient sur la tronche si l’affiche
avait présenté : France-Algérie. Oui, je sais ! je frôle le
sportivement incorrect : la façon dont certains occiputs rasés ont fêté la victoire des Fennecs relevait davantage
de la provocation à l’adresse des
nationaux que de la sincère jubilation. Mais là… carton rouge ! Ne surtout
rien dire, minimiser voire nier dans le pur respect du bréviaire gestionnaire
de l’autruche.
M’en
fous ! Mon confort, au contraire d’un Sarkozy, c’est de n’être ni écouté,
ni lu…